Que faire des économies réalisées par les services Achats ?

Jack Miles
Jack Miles

Jack is an advisor known for his experience developing and executing business strategies and his ability to deliver operational excellence in functions which typically under perform in most companies. He has lead procurement teams in both the public and private sector and is a member of Coupa's Visionary Council.

Temps de lecture : 5 mins
Marteau cassant une tirelire.

Dans mon dernier article, j’ai abordé la manière de définir les économies ainsi que la formule à utiliser pour leur calcul. À mon sens, une définition claire constitue la base d’une collaboration efficace entre les services Achats et Finance. C’est un processus qui devrait être mené par les équipes Achats, approuvé par les responsables Finance et Audit, puis diffusé à l’ensemble de l’entreprise.

En hautes sphères, certaines questions reviennent toutefois inévitablement : qu’advient-il de ces économies ? Sont-elles réinvesties dans l’entreprise pour financer d’autres besoins ? Reviennent-elles au service Finance pour être réaffectées à un autre département ? Sont-elles directement réinjectées dans les résultats financiers ? Sans réponse précise, peut-être serait-il judicieux d’étudier l’ensemble de ces questions pour définir avec précision ce que sont les économies.

C’est un sujet qui peut devenir éminemment stratégique au sein des entreprises. Et je dois dire que je m’en suis toujours tenu à l’écart au cours de ma carrière. La décision ne relève pas des services Achats. Cela se joue entre les responsables de l’entreprise et les équipes Finance. Les services Achats doivent soutenir cette décision, quelle qu’elle soit. Toutefois, son impact est important pour la fonction Achats et j’ai ma propre opinion à ce propos.

L’efficacité des services Achats et la volonté des unités opérationnelles de les impliquer dans leurs propres processus dépendent du traitement réservé aux économies, selon si ces dernières sont retirées de leur budget, retenues pour d’autres dépenses, etc.

Si une unité opérationnelle collabore avec les achats pour économiser 100 000 euros, est-ce que le CFO leur permettra de consacrer cette somme à un autre achat ? Vous pouvez déterminer les critères qui définissent les économies, effectuer vos calculs et obtenir un consensus sur les montants économisés, mais si ceux-ci sont récupérés pour être affectés ailleurs, cela n’encouragera guère la collaboration avec les services Achats. Il devrait en être autrement, mais il est dans notre nature, en tant qu’êtres humains, de privilégier notre propre intérêt.

Tout est une question d’unités

Je pense ainsi que la meilleure stratégie à adopter au moment de définir les économies n’est pas de s’intéresser uniquement à l’argent à dépenser, mais de considérer également le nombre d’unités à acheter.

Par exemple, lorsque vous achetez du matériel informatique (ordinateurs de bureau, ordinateurs portables, etc.), vous payez un certain prix. Si le service Achats intervient et négocie, il se peut qu’en définitive vous obteniez un produit différent, ou une simple remise sur le prix du produit existant. Quoi qu’il en soit, si cela vous coûtait auparavant 1 euro et que vous payez à présent 90 centimes, vous réalisez une économie de 10 centimes par unité.

En principe, chacun devrait y trouver son compte. Le problème ? Les dépenses ne sont habituellement pas planifiées de cette façon. Si un budget d’un million d’euros est prévu pour l’achat de matériel informatique, et que le service Achats parvient à réduire le prix de 10 % pour une dépense totale de 900 000 euros, le montant budgétisé reste d’un million d’euros.

En planifiant le budget et les économies sur la base du nombre d’unités, vous permettez à vos collaborateurs d’acheter ce dont ils ont besoin sans qu’ils aient à se soucier de ce que deviennent les économies. Ils avaient besoin de X unités, ils ont pu acheter X unités. Le fait que l’argent économisé soit alloué à d’autres fins est alors bien moins problématique.

L’approche Zero-based budgeting

Bien que cela semble plutôt simple, les entreprises ont souvent du mal à déterminer le nombre d’unités qu’elles vont devoir acheter, ce qui complique les choses. Il n’est pas rare que le nombre d’unités à acheter soit déterminé en fonction d’un budget préalablement établi, mais que ce budget ne puisse pas être décomposé en unités.

Si tel est le cas, la méthode utilisée pour l’établissement de budgets tenant compte des économies mériterait d’être revue. J’ai toujours pensé que l’approche du Zero-based budgeting était la plus efficace. Concrètement, cette technique consiste à commencer chaque période budgétaire à zéro et à définir d’une part ce que l’on va faire et d’autre part ce que cela va coûter. Les dépenses envisagées devraient être le résultat d’analyses précises et non pas d’une estimation approximative ou d’un pourcentage incrémenté sur la base de la période précédente.

Dans ce scénario, le service IT prévoit de remplacer X ordinateurs de bureau, ordinateurs portables et serveurs l’année prochaine. Un montant Y d’euros a été budgétisé pour chaque unité. Les calculs ont été effectués et un budget d’un million d’euros a été défini.

Si le service Achats collabore avec le service IT pour négocier un meilleur tarif à l’unité, il ne devrait pas y avoir de débat concernant les économies réalisées puisque le service IT obtiendra, dans tous les cas, le nombre d’unités qu’il avait budgétisé initialement.

Cette méthode est plus longue et plus difficile à appliquer, mais elle renforce aussi le pouvoir de négociation des responsables du budget. Lorsqu’on leur indique que leur budget est trop élevé, ils peuvent alors répondre que les dépenses ont été planifiées en fonction du coût de chaque unité devant être achetée.

Tout le monde est gagnant. Quand bien même l’usage des économies réalisées ne dépend pas in fine du service Achats, ce dernier est impacté. Une approche basée sur le nombre d’unités tend à éloigner les achats, voire la finance dans une certaine mesure, des querelles budgétaires entre services. Cela permet aux équipes Achats de se consacrer à leur fonction première : acheter au meilleur prix.